Inondations en Asie du Sud-Est : pourquoi pleut-il autant en ce moment ?

Florent SCHINDLER
Par Florent SCHINDLER, météorologue
Inondations en Asie du Sud-Est : pourquoi pleut-il autant en ce moment ?
Crédit : Images d'illustration / Adobe Stock
Thaïlande, Indonésie, Malaisie, Sri Lanka : des pluies torrentielles alimentent crues et glissements de terrain, avec des inondations majeures qui ont déjà fait plusieurs centaines de victimes et des milliers d’évacuations. En cause, une configuration typique de la saison humide, renforcée par le passage de systèmes tropicaux et par la saturation rapide des sols.

L’Asie du Sud-Est est confrontée à un scénario météo bien connu dans la région, mais porté à un niveau extrême. Les pluies continues, parfois diluviennes, transforment rues et plaines en rivières, provoquent des débordements rapides et déclenchent des glissements de terrain.

En Thaïlande, le sud du pays, notamment la province de Songkhla et la ville de Hat Yai, se retrouve en alerte maximale. Sur l’île indonésienne de Sumatra, les plaines de l’ouest sont sous l’eau. Au Sri Lanka, l’armée a été mobilisée pour évacuer des habitants isolés et soutenir les secours dans des zones devenues difficiles d’accès.

Fin novembre : une période naturellement propice aux pluies, surtout dans le Sud

À la fin du mois de novembre, une grande partie de l’Asie du Sud-Est entre pleinement dans la saison des pluies. Le mécanisme météo est classique : les vents dominants véhiculent un air chaud et très humide, et les épisodes pluvieux peuvent s’enchaîner sur plusieurs jours. La situation varie toutefois d’un pays à l’autre, et parfois même à l’intérieur d’un même pays, selon l’orientation des vents et la présence de reliefs.

À l’échelle régionale, la fin novembre marque l’installation (ou le net renforcement) du régime de mousson sur une grande partie du sud de l’Asie : en Indonésie (notamment vers Sumatra), en Thaïlande surtout au Sud péninsulaire, et jusqu’au Sri Lanka, les flux dominants rabattent de l’air très humide depuis les mers tropicales vers les terres. Des zones de convergence s’organisent alors, entretiennent des bandes pluvieuses durables et favorisent des séquences parfois orageuses. Dans ce contexte, les sols se gorgent rapidement d’eau et la moindre sur-intensification se traduit par un ruissellement immédiat, une réaction rapide des cours d’eau et un risque élevé de crues soudaines.

Les secteurs littoraux et les péninsules exposés à l’humidité maritime, comme le sud thaïlandais, sont particulièrement sensibles, tandis que les régions de relief, au Sri Lanka notamment, deviennent propices aux glissements de terrain dès que la saturation des sols est atteinte.

Le “coup d’accélérateur” : systèmes tropicaux et sols saturés

Si l’on bascule ici dans un épisode potentiellement dramatique, c’est parce que la dynamique de mousson ne joue pas seule.

Des systèmes tropicaux (tempêtes ou dépressions) viennent se superposer au régime de saison. Ils fonctionnent comme de véritables « pompes à humidité » : l’air converge vers la zone dépressionnaire, s’élève, condense et génère des bandes pluvieuses très actives, parfois stationnaires. Au Sri Lanka, une tempête tropicale (Ditwah) a ainsi balayé l’île, renforçant brutalement les pluies en peu de temps et compliquant la réponse des services de secours.

Dans ce type de configuration, la répétition des pluies devient déterminante. Lorsqu’il pleut fort plusieurs jours de suite, les sols se saturent et perdent leur capacité d’absorption. L’eau ruisselle alors immédiatement, gonfle les rivières, accélère les crues et augmente le risque de glissements de terrain, notamment sur les terrains meubles ou déjà fragilisés. C’est cette « mémoire » des sols, déjà imbibés, qui fait souvent la différence entre de fortes pluies et une catastrophe.

Enfin, un facteur de fond contribue à renforcer ces extrêmes : un climat plus chaud favorise une atmosphère plus chargée en vapeur d’eau. Lorsque les mécanismes météo sont réunis, cette humidité supplémentaire peut se traduire par des intensités de pluie plus élevées et des cumuls plus importants, ce qui accroît mécaniquement la probabilité de crues soudaines et leurs impacts.

Cet épisode illustre une réalité météo de la zone : la saison des pluies est normale à cette période, mais l’arrivée de systèmes tropicaux et la persistance des précipitations peuvent faire basculer très vite vers une situation critique.

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